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Devoir d’information en assurance de prêt : il bénéficie à tous les emprunteurs, avertis ou non

Le devoir d’information du prêteur, en matière d’assurance, bénéficie à tous les emprunteurs, avertis et non avertis. Ce devoir est indépendant des obligations du prêteur en matière de crédit, notamment de mise en garde contre le risque d’endettement excessif. Il appartient donc au prêteur d’identifier les risques dont la couverture apparaît opportune lors de la souscription du prêt (Cour de cassation, 30 septembre 2015), spécialement celui de la perte de solvabilité à la suite d’un accident de santé.

Après l’octroi du prêt, finalisé en 2007, l’emprunteur est victime d’un accident de santé. Sa situation entraîne la perte de revenus ; le crédit ne peut matériellement plus être remboursé comme prévu au contrat. Or, le prêteur, qui n’a pas manqué à son devoir de mise en garde en crédit, celui-ci n’étant pas dû compte tenu du profil de solvabilité de l’emprunteur, n’a en revanche préconisé aucune assurance venant couvrir le risque d’insolvabilité découlant d’un accident de santé.

Le Tribunal de grande instance a considéré que le contrat de prêt était soumis aux dispositions du Code de la consommation et, point notable, que le prêteur était défaillant dans son devoir de conseil (en crédit, donc) pour ne pas avoir prévenu l’emprunteur des risques d’aggravation progressive de son endettement. En outre, tant le TGI que la Cour d’appel relève de nombreuses irrégularités commises par le prêteur, que ce soit dans le calcul du taux conventionnel ou de celui du Taux Effectif Global (TEG) que dans ses obligations précontractuelles, d’information, de mise en garde, voire de conseil. Les Juges du fond prononcent de manière très étayée la déchéance totale du droit du prêteur aux intérêts conventionnels.

Surtout, le prêteur « n’avait pas prévenu [le client] des risques d’endettement ou d’insolvabilité susceptibles de résulter, en l’absence de contrat d’assurance, d’un accident de santé d’un des associés, et qu’elle ne lui avait pas proposé de souscrire un tel contrat » indique la Cour de cassation. Pour la Cour d’appel, « il entre pourtant dans le devoir du banquier qui propose un prêt à son client de l’informer sur les risques d’endettement prévisible provoqués notamment par la survenance d’un sinistre dont il lui revient de prévenir les conséquences par une proposition d’assurance adaptée à sa situation ».

Aussi, la Cour de cassation précise que « le devoir d’information du prêteur en matière d’assurance bénéficie à tous les emprunteurs, fussent-ils avertis, et s’impose indépendamment de tout risque d’endettement excessif, la souscription d’une assurance destinée à garantir le remboursement d’un prêt n’étant pas déterminée par le niveau d’endettement de l’emprunteur mais par la perspective d’un risque dont la couverture apparaît opportune lors de la souscription du prêt ».

Le préjudice résultant du manquement de l’établissement de crédit à ses obligations d’information de l’emprunteur sur la possibilité de contracter une assurance et de mise en garde contre les risques de ne pas adhérer à un tel contrat, est constitué par « la perte de chance de souscrire ce contrat » et non par « la perte d’une possibilité de renoncer à l’emprunt ».

Depuis le 1er octobre 2008, le prêteur a l’obligation de formuler cette proposition d’assurance (article L. 312-8 4° bis du Code de la consommation) : l’offre « mentionne que l’emprunteur peut souscrire auprès de l’assureur de son choix une assurance ». À cette fin, des dispositions sont mises à la charge du prêteur, notamment la remise d’une notice précise (article L. 312-9 du Code de la consommation).

En passant, la Cour de cassation rappelle que les Juges du fond peuvent relever d’office l’enfreinte de son devoir d’information et de son devoir de mise en garde par le prêteur, mais que ce point doit nécessairement faire l’objet d’un débat contradictoire entre les parties, conformément aux principes élémentaires de procédure civile.

Les obligations précontractuelles du prêteur, qu’il s’agisse d’octroi de crédit ou de proposition d’assurance sont distinctes et cumulatives. Elles peuvent s’entremêler, quand le devoir d’information en assurance s’impose au bénéfice de l’emprunteur. Outre l’information et la mise en garde quant au crédit, le professionnel doit également à l’emprunteur information et mise en garde en matière d’assurance (ou des conséquences de l’absence d’assurance) contre le risque d’insolvabilité qui serait consécutif à un accident de santé. Il est conseillé aux prêteurs et aux Courtiers-IOBSP de bien veiller à l’information exhaustive des emprunteurs, y compris en assurances du prêt.

Cour de Cassation, Civ. 1ère 30 septembre 2015 n°14-18.854 par Légifrance.

Cour d’appel d’Aix-en-Provenve, 6 février 2014, n°12/23725